
mademoiselle baudelaire
De Yslaire (Dupuis)
Yslaire, de son vrai nom Bernard Hislaire, avait déjà illustré un sombre romantisme dans sa série Sambre (Glénat), et côtoyé les anges avec XXe Ciel (Humanoïdes Associés). Il explore cette fois les cercles des artistes du XIXe siècle. Ainsi, aux côtés de Charles Baudelaire, reprennent vie Théophile Gautier, Nadar, Gustave Courbet ou encore Eugène Delacroix... L’élégance et la vivacité du trait ténébreux, propres à Yslaire, renforcent aussi bien l’évocation fantastique des rêves que la puissance érotique des corps. Les poèmes et tableaux fameux de l’époque sont tapis à chaque coin de case, tels les chats guettant leur proie ; entre le clin d’œil et l’hommage, ils viennent ainsi exhumer l’envers du décor, sans oublier que le temps passe et changera les plus belles fleurs (du mal ?) en charognes. Le sphinx mi-femme mi-félin qui ponctue le récit comme un refrain nous dit toute la part de mystère qui entoure les inspirations de Baudelaire et préfigure le symbolisme de la fin du siècle. Jeanne, l’amante sous-estimée, extériorise la part d’ombre de Charles mais pour résoudre l’énigme, elle donne la parole à tous ceux que l’histoire voudrait garder cachés. Avec cette biographie revisitée, c’est sans doute ici que l’expression "roman graphique" prend le mieux tout son sens.(NT)